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Le blog de Docteur Parissa Zandi - Médecin Vasculaire / attaché à l'hôpital Européen Georges Pompidou de Paris - FRANCE

Point sur la prise en charge de l’AVC avec le Pr Amarenco de l’hôpital Bichat Claude Bernard (AP-HP)

28 Avril 2011, 07:43am

Publié par Docteur Parissa Zandi

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"A l’occasion de la publication du Palmarès du Figaro Magazine qui a mis à l’honneur plusieurs services de l’AP-HP parmi lesquels le service du Pr Amarenco, chef de service du service de Neurologie et du Centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale de l’hôpital Bichat Claude Bernard (AP-HP), retour sur l’approche neuro-interventionnelle, au sein d’une unité de soins intensifs (USI) neuro-vasculaires qui pourrait être l’avenir du traitement de l’attaque cérébrale avec le Professeur Pierre Amarenco (AP-HP) qui répond à nos questions."

 

"Pouvez-vous nous parler de votre approche de prise en charge des AVC ?

Il s’agit d’un traitement en urgence de l’AVC (dans les moins de 3 heures suivant le début des symptômes). Ce traitement consiste a déboucher l’artère occluse par un caillot sanguin à l’intérieur du cerveau (dans 80% des cas, l’AVC est provoqué par un caillot sanguin qui bouche une artère du cerveau). Les 20% restants, c’est une hémorragie qui est en cause. Si l’on peut déboucher l’artère cérébrale moins de 3h30 après son occlusion (après les premiers symptômes d’AVC), le résultat est de 93% de guérison des patients. Toute demi-heure perdue au-delà de 3h30, c’est 20% de guérison en moins.

Pouvez-vous nous rappeler quelles sont les techniques existantes aujourd’hui pour traiter les AVC ?

Il existe actuellement deux traitements pour contrer les AVC :
L’injection intra-veineuse (au pli du coude) d’un médicament appelé Actilyse® (alteplase) permet de guérir le patient dans 40% des cas, mais seulement si l’injection a débuté moins de 3 heures après les premiers symptômes d’AVC. Le défaut de l’injection intra-veineuse de ce médicament est qu’il ne permet de déboucher l’artère occluse du cerveau que dans 25 à 60% des cas.
La délivrance du médicament (alteplase) directement au contact du caillot qui bouche l’artère, en passant par l’intérieur des artères un micro-cathéter. Cette technique permet de déboucher l’artère dans 60 à 70% des cas. Son défaut est qu’il prend du temps (entre 20 minutes et une heure pour atteindre le caillot). Or toute minute perdue c’est 2 millions de neurones détruits.

L’approche du traitement utilisée dans l’étude RECANALISE est de combiner les deux traitements utilisés. Comment se déroule l’intervention ?

En pratique, dès que le patient atteint d’un AVC arrive à l’hôpital, il reçoit immédiatement le traitement alteplase par voie veineuse (si le patient est vu moins de 3 heures après le début des symptômes d’AVC) et immédiatement on ponctionne son artère fémorale pour monter le cathéter au contact du caillot dans le cerveau. Lorsque le cathéter arrive au contact, on arrête l’injection intraveineuse d’alteplase, et l’on injecte l’alteplase par le cathéter directement dans le caillot pour finir de le dissoudre. Si la dose complète d’alteplase (que l’on ne peut pas dépasser) ne suffit pas pour finir de déboucher l’artère, alors, le neurologue interventionnel « capture » le caillot au moyen d’un lasso situé au bout du catheter. En tirant sur le lasso, le caillot est emprisonné à l’intérieur du cathéter ; le cathéter est retiré, et le caillot avec.

Quels sont les bénéfices selon vous de ce mode de prise en charge ?

Le nombre de guérison immédiate est très important : 60% des patients traités par la nouvelle méthode comparativement à 39% des patients traités par voie intraveineuse conventionnelle. Enfin, 57% des patients traités par la nouvelle technique ont été guéris dans les 3 mois comparativement à 44% des patients traités par la méthode conventionnelle. Un des résultats les plus remarquables est que plus vite l’artère est débouchée, plus de chance a le patient de guérir dans les 3 mois.

Une autre nouveauté est que nous montrons que l’intégration complète d’une activité endovasculaire systématique à une unité de soins intensifs neurovasculaires, en collaboration avec le service de radiologie, est efficace et permet de guérir plus de patients. Ce bénéfice n’est pas seulement dû à la technique des médecins, mais surtout à la logistique fournie par l’unité neurovasculaire avec des infirmières formées, entraînées, connaissant les procédures et un matériel en permanence prêt et disponible pour les actes de thrombolyse intraveineuses et intra-artérielles. Cette logistique, disponible 24 heures sur 24, 365 jours par an, est en fait l’élément clef de la réussite de l’étude RECANALISE et elle est à mettre au crédit des Cadres de Soins et du Cadre Supérieur Infirmier et de leurs équipes.

Cette approche neuro-interventionnelle semble très efficace, est-ce qu’elle pourrait devenir l’avenir du traitement de l’attaque cérébrale ?

Dans les prochaines années, on peut anticiper que la neurologie interventionnelle va se développer au sein des unités de soins intensifs (USI) Neuro-vasculaires, comme nous avons vu, au cours des années 90, se développer la cardiologie interventionnelle au sein des unités de soins intensifs (USI) cardiologiques.

Quelle tranche d’âge touche les AVC ? Pouvez-vous nous rappeler les symptômes les plus courants des AVC ?

L’AVC touche les personnes de tous âges : La moyenne d’âge des patients atteints d’AVC est de 73 ans Mais parmi les 150 000 français atteints d’AVC chaque année, 20% (30 000) sont des sujets de moins de 55 ans.

Les symptômes les plus courants des AVC sont au nombre de 6 : 1. une faiblesse musculaire ou une paralysie : on ne peut plus bouger une partie de son corps d’un côté ; toutes les parties du corps peuvent être touchées. Mais le plus souvent, il s’agit de la face, du bras, de la main et/ou de la jambe. Très fréquemment, la face, le bras et la jambe du même côté sont atteints en même temps on parle d’Hémiplégie (Perte de la possibilité de faire des mouvements avec les membres du même côté du corps - ex : membre inférieur et supérieur droit). Quand les mouvements sont possibles mais avec moins de force, on parle d’hémiparésie) 2. une perte de la sensibilité : on sent un engourdissement ou une insensibilité d’une partie du corps 3. une difficulté du langage : il s’agit, soit d’une gêne pour articuler (appelée Dysarthrie : Difficulté à articuler les mots, à ne pas confondre avec l’aphasie.), soit d’un trouble du langage (Aphasie : Trouble du langage mêlant des difficultés d’expression et de compréhension, à des niveaux variables) portant sur l’expression (mutisme, difficulté à trouver les mots ou jargon avec mots inintelligibles) et pouvant être associé à des difficultés de compréhension 4. un trouble visuel : soit on perd brusquement la vision d’un oeil (cécité unilatérale) ou plus rarement des deux, soit on perd la vision de la moitié du champ visuel des deux yeux en même temps (Hémianopsie : Diminution ou perte de la vision de la moitié du champ visuel (gauche ou droit)), ou encore, on voit soudain les choses en double (Diplopie, on voit deux fois le même objet au lieu d’un seul : vision double) 5. perte de l’équilibre ou de la coordination des mouvements des membres : le sujet marche soudain comme une personne ivre ou il ne tient plus debout 6. un mal de tête, d’apparition brutale, inhabituel et très intense

D’autres symptômes d’AVC sont moins fréquents : Troubles de la conscience pouvant aller de la somnolence au Coma (Etat de perte de la conscience. Le patient ne répond plus ou partiellement aux stimulations extérieures. Il n’y a plus de mouvement spontané).

En cas de symptômes d’AVC, il n’y a pas une minute à perdre, il faut appeler le 15 ou le 112. L’AVC est une urgence « toute minute perdue c’est 2 millions de neurones détruits ». "

 

Pour plus d’informations sur les AVC : http://www.attaquecerebrale.org

Propos recueillis par Sandrine Boidy-Pruvot (AP-HP) - 1ère diffusion août 2009

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